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A l'étale de basse mer ...
11 février 2007

l'envers du décor

    Sans conteste, l'acte que je préfère dans les contes d'Hoffmann est le deuxième, celui d'Antonia. Hier en le suivant avec l'aide terriblement appréciable de l'audio-description je crois bien avoir saisi l'intention de Robert Carsen et j'ai encore plus adhéré à son point de vue que la première fois que j'avais assisté à cet opéra dans cette version.

"Le deuxième acte a lieu chez la musicienne Antonia qui vit avec son père Crespel. Le décor imite une fosse d'orchestre avec les chaises vides et les pupitres des musiciens. La scène de théâtre de l'acte précédant, avec son cadre et son rideau rouge, est remontée de quelques mètres pour nous donner l'illusion, , à nous spectateurs, d'être placées plus bas, à la hauteur de la fosse d'orchestre."

Voilà exactement les mots que j'ai entendu dans mon casque, lus de la manières la plus neutre et pourtant malgré tout bien charmante par une voix féminine. En fait à chaque fois que j'entend toutes ces indications bien utiles j'ai comme l'heureuse impression que c'est un ange qui me les souffle, le rêve serait que dans ma vie quotidienne mon ange gardien me guide ainsi. Mais revenons au sujet.

Antonia dont Hoffmann est épris souffre d'un terrible mal qui la condamne à ne plus chanter sinon elle meurt. son père Crespel est convaincu que Hoffmann a une mauvaise influence sur elle et risque de l'amener à commettre l'irréparable. Il a déjà perdu ainsi sa femme, la mère d'Antonia. L'essentiel de l'action se passe dans la fosse d'orchestre avant que ne surgisse en haut devant le rideau rouge le docteur miracle, nouvelle personnification dans ce conte du diable. Il prétend guérir Antonia mais Crespel sait tout l'effet funeste qu'il a déjà eu sur sa femme et le repousse. Ce moment est l'occasion d'un superbe trio (Dr Miracle, Crespel, Hoffmann) dont la force dramatique m'a encore séduit hier : les inter prêtes Franck Ferrari, Alain Vernhes,  et Rolando Villazon y sont évidemment pour quelque chose.

chassé, le diable attend qu'Antonia soit seule pour reparaître. Depuis la scène en surplomb de la fosse d'orchestre il va user de sa baguette magique pour faire chanter Antonia jusqu'à l'épuisement.

Et soudain une simple indication de mon ange gardien m'a donné la clé de toute la mise en scène : "il use d'une baguette de chef d'orchestre".

Forcément celui qui dirige une cantatrice à distance est le chef d'orchestre. La figure du diable dans cet acte c'est donc lui, joué par Franck Ferrari mais aussi présent depuis le début en la personne du chef qui dirige l'orchestre, Marc Piollet

On est dans le comble du méta-opéra. A la fin le diable triomphe après avoir fait ouvrir le rideau rouge sur le fantôme de la mère d'Antonia, debout à coté de la statue du commandeur, et avoir conduit Antonia à l'extrême limite de ses forces et c'est à cet instant que les musiciens entrent pour prendre leur place dans la fosse d'orchestre. Il agite sa baguette alors en leur direction. Quoi de plus explicite !

Je serai moins disert sur le troisième acte qui n'était plus pour moi qu'une confirmation du précédent. Le diable dans ce conte dont l'action se déroule en principe à Venise mais dans cette mise en scène dans les places du public d'un théâtre qui nous fait face comme un miroir déformant , n'est autre que le metteur en scène. drôle d'impression que de penser que Carsen se désigne lui-même. C'est donc cet implacable metteur en scène qui donne la plume à Hoffmann, une nouvelle fois humilié,  pour qu'il écrive ses infortunes.

En fin de compte cette vision d'Hoffmann est indubitablement parano. C'est le compositeur tourmenté par le chef d'orchestre, le metteur en scène et je crois bien le directeur de l'opéra (c'est ce qu'il m'a semblé dans l'épilogue.

Je n'ai alors pu m'empécher de faire le rapprochement avec les propos d'Aubert Lemeland sur la mise en scène catastrophique de son opéra "la lettre au cachet rouge", preuve selon lui  d'une totale incompréhension de son oeuvre. Il est faux de croire que les destins romantiques d'auteurs qui restent dans l'ombre avant que la postérité ne les remettent en lumière comme dans la dernière scène des contes d'Hoffmann n'appartiennent qu'à une époque révolue. J'espère tout de même que justice ne tardera pas à être rendue à Aubert Lemeland. Si j'en avais le pouvoir, je le ferai. Malheureusement, je n'ai même pas le pouvoir d'abréger les réunions politiques pour éviter de rater la première partie des contes d'Hoffmann.

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